Sissi, leader de la contre-révolution égyptienne (Essf)

Publié le par revolution arabe

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Plus de 3 ans après la chute de Moubarak, le processus révolutionnaire en Egypte vit des jours difficiles.

 

L’élection présidentielle qui aura lieu le 26 mai va très certainement voir la victoire du maréchal Sissi, véritable leader de la contre-révolution et soutenu à coup de milliards par l’Arabie Saoudite.Dans le cadre de ces élections, la machine étatique et ses alliés font tout pour favoriser son élection: soutien sans équivoque de l’armée, de la bourgeoisie égyptienne et des anciens partisans de Moubarak, des médias publics et privés qui font campagne pour le maréchal. La loi électorale limite les recours contre les résultats, l’opposition est réprimée, etc.

 


Au début du mois de mai, lors des premiers jours de sa campagne présidentielle, Sissi promettait néanmoins que l’armée ne jouerait aucun rôle au pouvoir en Egypte s’il était président… Cela ne l’avait d’ailleurs pas empêché de soutenir en janvier 2014 une nouvelle Constitution qui place l’Etat égyptien sous la tutelle de l’armée et autorise le jugement des civils par les cours martiales.

Sissi et le retour du régime de Moubarak

Le nouveau gouvernement égyptien désigné en février a marqué un retour au premier plan de nombreuses personnalités connues pour leur collaboration avec le régime Moubarak, notamment le nouveau Premier ministre Ibrahim Mehleb qui est un ancien cadre du parti du dictateur déchu, le Parti national démocratique.

Au niveau régional, le principal soutien du régime est l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis, qui ont versé plus de 20 milliards de dollars depuis juillet 2013.

Sissi et la répression

Depuis le 3 juillet 2013, jour de la chute de l’ex-président Morsi, le régime de Sissi a tué plus de 2660 membres du mouvement des Frères musulmans et en a arrêté environ 21 000. Le mouvement est considéré comme une organisation terroriste.


Cette répression ne s’est toutefois pas bornée aux membres des Frères, la soi-disant campagne de la «  guerre contre le terrorisme  » servant de prétexte pour limiter les libertés et droits de tout le monde. Les attaques perpétuelles contre nos camarades du Front de la voie révolutionnaire (qui s’oppose à la fois à l’armée et aux Frères musulmans et qui rassemble des partis de gauche et libéraux) illustrent bien cette situation. Le Front a d’ailleurs tenté de manifester dans les rues du Caire le 25 janvier 2014, mais peu après le début de la manifestation, elle fut dispersée par les policiers entraînant la mort de 5 personnes.

Luttes politiques et sociales

Les résistances politiques et sociales contre le retour de l’Etat policier n’ont néanmoins pas cessé. Les membres des Frères musulmans organisent chaque semaine des manifestations pour protester contre le régime de Sissi.

Les étudiant·e·s des universités jouent un rôle central depuis plus de six mois dans la résistance populaire au régime militaire, tandis que depuis le début de l’année, les protestations pour des raisons socio-économiques étaient à nouveau en nette hausse dans divers secteurs aussi vitaux que les transports publics, la poste, les offices notariaux ou les hôpitaux publics.


La raison principale de la multiplication des mobilisations à revendications sociales est l’inaction du régime de Sissi dans ce domaine. L’adoption de la nouvelle Constitution, très largement boycottée par la jeunesse égyptienne, n’a en effet pas été suivie d’annonces de mesures sociales. Les travailleurs et travailleuses attendaient au moins de recevoir le salaire minimum promis, une des revendications principales de la révolution et cela depuis 2011.

Le régime a bien adopté un salaire minimum en janvier 2011, mais cela ne concerne que 2 % des em­ployé·e·s de la fonction publique.


Cette explosion sociale a mené à la démission du gouvernement de Hazem El-Beblawi, très impopulaire et qui aurait pu ternir la candidature de Sissi.

Hamdeen Sabahi et les élections

Une partie des forces révolutionnaires qui s’opposent à la fois aux militaires et aux Frères musulmans ont apporté un soutien au candidat nassérien H. Sabahi, qui était arrivé en troisième place lors du premier tour des élections présidentielles de juin 2012.


Ce soutien à la candidature de H. Sabahi n’est pas acritique. Tout d’abord, H. Sabahi a tergiversé à plusieurs reprises dans ses alliances et ses positions politiques par opportunisme. Ainsi, plusieurs membres de son parti « Karama » étaient entrés à l’Assemblée nationale en tant que candidats des listes conduites par les Frères musulmans. H Sabahi s’est tu sur la répression violente et a aussi soutenu la campagne de la «  guerre contre le terrorisme  » utilisée par l’Etat comme prétexte pour permettre le retour de l’Etat policier.

 


Sabahi a ensuite appelé à voter en janvier 2014 pour la nouvelle Constitution, qui place l’Etat égyptien sous la tutelle de l’armée. De plus, à la suite de l’annonce de la candidature de Sissi pour les élections présidentielles de mai, Sabahi a déclaré qu’en cas de victoire du maréchal, il pourrait soit participer au pouvoir, soit mener une «  opposition constructive  ».


Le vote pour H. Sabahi représente malgré tout la possibilité de renforcer un espace démocratique dans cette cam- pagne et une forme d’opposition, parmi d’autres, à Sissi, véritable représentant de la contre-révolution et du retour au régime de Moubarak.


En même temps, le soutien critique à H. Sabahi ne doit en aucun cas laisser la place à des illusions sur la nécessité de construire un front progressiste large qui représente les intérêts des classes populaires et clairement indépendant de l’armée et des islamistes, car comme l’affirmait la syndicaliste et militante Fatma Ramadan  : «  il n’y a pas de droits sans révoltes  ».


Joseph Daher* Paru dans "solidaritéS n° 248 (15/05/2014). http://www.solidarites.ch/

 

http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article31985

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