Sept révolutionnaires égyptiens menacés d’expulsion de France (essf)

Publié le par revolution arabe

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Alors que la dérive dictatoriale de l’Egypte s’accélère, comme en témoigne la condamnation à mort, lundi 24 mars, de cinq cent vingt-neuf partisans de l’ancien président Mohamed Morsi, sept jeunes révolutionnaires égyptiens résidant illégalement en France sont menacés d’être expulsés vers leur pays d’origine, où ils redoutent d’être arrêtés.


Interpellés le 28 janvier à la fin d’une manifestation improvisée devant le bureau militaire de l’ambassade d’Egypte, près de la place de l’Etoile, à Paris, ces militants avaient passés seize heures en garde à vue au commissariat du 8e arrondissement. Trois d’entre eux avaient même été placés en rétention au centre de Vincennes, puis relâchés peu après, sur décision d’un juge des libertés.

 

Tous ont reçu un ordre de quitter le territoire français. Un comité de soutien s’est créé, regroupant partis de gauche (PCF, Parti de gauche, NPA, EELV), syndicats (Snesup-FSU) et associations (Attac, MRAP), qui demande l’annulation de ces mesures d’éloignement. En cas de non-respect du délai d’un mois dont ces mesures sont assorties, les personnes visées s’exposent, si elles sont de nouveau arrêtées, à être reconduites à la frontière. «  Le problème, c’est que ces Egyptiens sont bien connus des services de l’ambassade, affirme la chercheuse Françoise Clément, membre du comité. Ils ont déjà reçu des menaces. S’ils sont expulsés, avec le pouvoir en place au Caire, ils risquent d’être arrêtés et de subir des mauvais traitements. »


NI MORSI NI SISSI

L’un des militants, qui a déposé un recours devant le tribunal administratif, a d’ailleurs obtenu que l’Egypte ne figure plus comme pays de destination sur son ordre de quitter le territoire français. Une décision prise eu égard à l’article 3 de la Convention européenne des droits humains, compte tenu du danger que ce jeune Egyptien encourt en cas de retour forcé dans son pays.


Les sept révolutionnaires en situation irrégulière sont des jeunes, âgés de 20 à 30 ans, venus principalement en France pour y chercher du travail. Ils militent au sein d’associations qui campent sur une ligne politique bien à part. Elles sont opposées aussi bien à l’actuel pouvoir militaire, incarné par le maréchal Abdel Fattah Al-Sissi, ministre de la défense et grandissime favori de la prochaine élection présidentielle, qu’au retour de Mohamed Morsi, le président issu des Frères musulmans, renversé en juillet 2013 et emprisonné depuis cette date.

 

Après avoir applaudi à sa destitution par l’armée, les « sept » ont réintégré les rangs de l’opposition dès l’automne, comme de nombreux autres libéraux égyptiens, choqués par loi retreignant le droit de manifester adoptée alors par le gouvernement. Depuis 2011, ils ont pris l’habitude de manifester devant la représentation égyptienne à Paris, sans être inquiétés par les policiers déployés devant le bâtiment. En mai de cette année-là, ils avaient même investi les locaux de l’ambassade pour protester contre le maintien en poste de Nasser Kamel, l’ambassadeur nommé du temps de Hosni Moubarak.


UN ORDRE PAR COUP DE TÉLÉPHONE

L’un des clandestins, coordinateur de l’association « 25 janvier Paris », se rendait régulièrement à la préfecture pour déposer des demandes d’autorisation de manifester. « A cette époque, après le loupé d’Alliot-Marie sur la Tunisie [en plein soulèvement contre le président Ben Ali, Michèle Alliot-Marie, alors ministre des affaires étrangères, avait proposé « le savoir-faire français » à la police tunisienne], le gouvernement était bienveillant avec les révolutionnaires, estime Françoise Clément. Il fermait les yeux, et les Egyptiens de Paris avaient le sentiment qu’il les protégeait. »


Le 28 janvier, quand après les avoir raccompagné au métro Etoile, les forces de l’ordre leur ont demandé leurs papiers d’identité, les jeunes manifestants ont donc été supris. Ils affirment que les policiers ont reçu l’ordre de les contrôler par un coup de téléphone, alors qu’ils marchaient vers la station. Au sein du comité de soutien, certains voient dans cet appel le signe d’une collusion entre l’ambassade et la préfecture.


Un sentiment renforcé par le fait que depuis le coup d’Etat militaire de juillet 2013, toutes leurs demandes de manifester devant l’ambassade ou le bureau militaire ont été rejetées. D’autres voient dans le tour de vis des autorités françaises une simple crispation après les débordements causés ces derniers mois par des manifestants pro-Morsi. En octobre 2013, des dizaines d’entre eux avaient interrompu une conférence de l’écrivain Alaa Al-Aswany à l’Institut du monde arabe. Et en janvier, une trentaine d’opposants islamistes avaient occupé le consulat de Neuilly-sur-Seine, avant d’en être évacués sans heurts.


Benjamin Barthe Journaliste au Monde

* LE MONDE | 26.03.2014 à 19h29 • Mis à jour le 26.03.2014 à 20h06.

 

http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article31473

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